Jésuite en mission : Vincent de Beaucoudrey sj à Homs

Du 28 avril au 1er mai, une rencontre de Taizé a eu lieu pour la première fois à Homs, en Syrie. Le P. Vincent de Beaucoudrey sj retrace ce temps fort qui a rassemblé 750 jeunes syriens.

Après une rencontre de Taizé au Liban, j’ai espéré que nous pourrions faire de même ici, à Homs : proposer, grâce aux frères de Taizé, une initiation à la prière … probablement plus accessible que nos propositions ignatiennes (bien que les chants de Taizé soient très loin des mélodies arabes) ; et pour travailler ensemble avec les sept Églises présentes dans la vieille ville.

Trois ans plus tard, le Covid s’est un peu éloigné, et Gerry, jésuite est arrivé pour se consacrer à la pastorale des étudiants, et ce rassemblement a pu avoir lieu du 28 avril au 1er mai dernier.

750 jeunes chrétiens de 18 à 25 ans de toute la Syrie, de 8 ou 9 Églises différentes, 4 jours, 6 prières ensemble, 37 ateliers, 6 églises accueillant les jeunes le matin, plus de 100 familles d’accueil pour les jeunes qui viennent de loin… et tout s’est bien passé !

Affronter ensemble les questions que se posent les jeunes syriens

Nous avons voulu affronter les vraies questions des jeunes : comment vivre en ces temps amers sans nous départir de la douceur nécessaire au vivre ensemble ?

Car 95 % ne pensent qu’à quitter la Syrie : les blessures de la guerre ne sont pas cicatrisées, l’économie ne cesse de s’enfoncer mois après mois, les formations universitaires ne sont pas à la hauteur, la conscription effraie…

Le décor symbolisait tout cela : nous avions laissé les deux bus abandonnés dans notre cour d’école comme toile de fond, car ainsi est Homs : en ruine. Les inscriptions sur les bus « école Saint-Jean Damascène » (qui datent des années 60… entre-temps, les jésuites n’ont plus d’école) évoquent la nostalgie si courante ici : la vie était plus facile dans le passé.
Entre les deux bus émerge une colonne de marbre romaine de plusieurs tonnes ; nous y avons installé une croix de fer forgé faite de restes de fenêtres de maisons effondrées.

Voir la vie au-delà des ruines

Devant ce bus, trois stèles immenses, blanches, solides rappellent que la vie ne s’arrête pas aux ruines ; d’autres fenêtres de maison y encadrent des icônes, copies des icônes principales des églises grecque orthodoxe, grecque catholique, syriaque orthodoxe et syriaque catholique de la vieille ville de Homs.

À chaque prière, elles sont changées, de manière à ce que chacun se sente un peu chez lui. Au sol, une estrade accueille la croix de Taizé, un cierge pascal longiligne que les sœurs trappistines ont fait pour nous et une immense vasque en cuivre qui nous rappelle que nous partageons le même baptême.
Les responsables des Églises ont béni ensemble l’eau pendant la prière du samedi soir et ont aspergé ensemble les jeunes. Quelques plantes rappellent enfin que le désordre ne vient pas seulement du chaos de la destruction mais aussi de la vie.

Vivre malgré le poids du passé et l’incertitude de l’avenir

Les temps de partage quotidiens voulaient explorer une question : comment vivre maintenant ? Comment vivre maintenant alors que le passé pèse lourd ? Comment vivre maintenant alors qu’on ne sait pas ce que sera demain, qu’on ignore même s’il restera des chrétiens en Syrie dans 50 ans… ?

On ne peut ignorer ni l’angoisse de l’avenir, ni le poids du passé ; mais comment les mettre à leurs places pour que la vie soit possible, ici, aujourd’hui ? Personne n’a la réponse à cette question mais, en ces quatre jours de rassemblement, nous avons fait ce pari fou que prier, partager et s’autoriser à être joyeux, à faire la fête même, peuvent aider chaque jeune à trouver sa manière d’y répondre.

Vincent de Beaucoudrey sj (Homs)

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