« La Compagnie de Jésus, dans ses différentes oeuvres s’est employée à développer une fraternelle coopération apostolique pour conquérir, réformer et former la société avec ses diverses composantes » . Ces propos du P. Joseph Delore sj définissent le sens profond d’une « mission jésuite ». « La Mission Jésuite de Ghazir – 1843-1965 » raconte les 122 années que les jésuites ont passé à Ghazir au Liban à travers des écrits, des photographies et des témoignages.

La Mission Jésuite de Ghazir 1843-1965 - Le retour de la Compagnie de Jésus au Liban (2) Le « Diaire de Ghazir » , que le Père Henri Jalabert sj qualifie de « document historique » , est notre principal témoin et occupe une place fondamentale dans cet ouvrage. De nombreux documents sont publiés pour la première fois, témoins des différentes périodes et des relations partagées par les Jésuites avec Ghazir, sa région et le Liban. Un travail de mémoire qui vient compléter le Mémorial dédié aux Jésuites de Ghazir.

Khalil Karam, Charbel Matta, La Mission Jésuite de Ghazir 1843-1965 : Le retour de la Compagnie de Jésus au Liban, Presse de l’Université Saint-Joseph, octobre 2019, 152 p.

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Éclairage du P. Claude Charvet sj

Ce livre n’a nullement la prétention de se présenter comme un ouvrage historique. Il complète le Mémorial des Jésuites paru en 2011. C’est un « livre-hommage » aux jésuites qui ont vécu leur mission au Liban. C’est d’autant plus touchant que les deux auteurs, Khalil Karam et Charbel Matta, sont natifs de ce village qui domine la baie de Jounieh à 500 mètres d’altitude et dont la beauté est à couper le souffle. Dès lors, avec un sens relationnel dans la meilleure tradition levantine, nous nous laissons conduire en tournant ces pages avec eux. De fait, nous allons de surprise en surprise : pas moins de trois préfaces ouvrent l’ouvrage dont celles du P. Arturo Sosa sj, du P. Salim Daccache sj, actuel Recteur de l’Université Saint Joseph de Beyrouth, et du P. Peter Hans Kolvenbach sj qui fut envoyé à Ghazir en 1958 comme jeune jésuite. Fin connaisseur, ce dernier sait reconnaître que « la mission des jésuites à Ghazir est sans doute la plus importante des missions d’Orient. Installée dès 1843 à Ghazir, elle a répondu à la mission qui lui a été confiée par le pape Pie VII et par le Père Roothaan, Supérieur général, à savoir, la création et l’organisation d’un séminaire oriental destiné à la formation du clergé pour toutes les Eglises orientales. Faut-il rappeler qu’avant d’être transférée et agrandie à Beyrouth, l’Université Saint-Joseph avait ses racines à Ghazir ? »

Un des grands intérêts de ce livre est la diversité des documents : on trouve, à la fois, des éléments nécessaires à la compréhension de la vie de saint Ignace et des débuts de la Compagnie de Jésus, mais, aussi, les premières missions des jésuites au Proche-Orient dès 1625 à Alep, Saïda (1644) Tripoli (1646), Antoura (1656). Le retour des jésuites à Ghazir, à partir de 1843, marque un nouveau départ dans un contexte très difficile. On sent la très fragile indépendance visà-vis de l’Empire ottoman qui contrôle largement les régions. Les jésuites apportent une vraie lumière dans la lutte contre l’ignorance et dans la formation d’hommes de foi capables d’animer des communautés chrétiennes dans ce contexte très complexe. Le « diaire de Ghazir » est la source la plus riche pour découvrir la vie quotidienne des Ghaziriens : ce journal de bord commencé en 1858 et terminé le 14 juillet 1965 par cet unique mot du Père Bruno Charvet cachant son émotion, « Départ », est une mine extraordinaire de renseignements. Les auteurs choisissent d’extraire des éléments de la Première guerre mondiale du 20 novembre 1914 au 28 décembre 1918. « Nous avons supprimé les Arméniens par le fer, nous supprimerons les Libanais par la faim », déclare le turc Enver Pacha… Les historiens ont encore bien du travail de première main à consacrer pour relire ces cent-vingt-deux années. Les auteurs nous mettent l’eau à la bouche. Le chapitre sur « la Congrégation des Sœurs des Saints-Cœurs de Jésus et de Marie » permet de comprendre la complémentarité de la mission éducative chez les jeunes filles, comme si l’éducation des garçons ne pouvait se faire sans l’éducation des filles, au Liban comme partout ailleurs. Ce « beau-livre » donne vraiment envie d’une suite. Khalil Karam et Charbel Matta ouvrent le goût d’aller plus loin dans la connaissance amoureuse du Liban.

P. Claude Charvet sj,
Communauté jésuite Saint-Fort à Bordeaux

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