La basilique saint Régis de Lalouvesc, haut lieu spirituel de l’Ardèche, abrite dans sa tour nord une cloche hors du commun.

Quelques chiffres

Un bourdon de cathédrale perché à 1100m d’altitude, les Alpes à l’horizon, sur la corniche du haut Vivarais, dans une commune de 500 habitants ! Ce bourdon imposant prénommé Joséphine en l’honneur de la donatrice qui l’offrit au sanctuaire, a pour note le Sol 2.

Coulé en 1865 à Lyon par Gulliet père et fils, il a été monté sur le plateau ardéchois tiré par six paires de bœufs. Il pèse 6 000 kg, plus 1 000 avec son battant et son mouton de chêne massif, soit 7 tonnes mises en mouvement les dimanches et solennités. Sa robe est ornée d’inscriptions en langue latine. Il s’agit de la plus grosse cloche de l’Ardèche et la 3ème de la région Rhône-Alpes.

Une cloche aussi imposante ne saurait être actionnée en tirant sur des cordes. Avant la motorisation, elle était mue à la bascule par 4 sonneurs debout au-dessus d’elle. Il ne reste qu’un des deux bras de balancier, l’autre ayant été enlevé pour installer la roue de la chaîne d’entraînement du moteur.

Avec le carillonneur

Début août 2013, un court-circuit causé par la foudre a mis le moteur de volée hors service. En attendant que celui-ci soit réparé et pour assurer les sonneries liturgiques, j’actionne le bourdon au pied, effort considérable pour un homme seul, qui nécessite de mesurer plus d’un mètre quatre-vingt-cinq, car quand la bascule est en position basse, je peux à peine lui donner l’impulsion nécessaire pour garantir la frappe des deux côtés. Heureusement, je fais du vélo et cela me vaut d’avoir des mollets solides!

La vidéo ci-dessus a été réalisée le 15 août 2013, jour de l’Assomption de la Vierge Marie. En cette solennité, le bourdon retentit avant et après la messe. Après avoir été prévenu par téléphone que la messe en plein air qui avait rassemblé près de 3 000 personnes autours de Mgr Blondel, évêque de Viviers, venait de se terminer, j’ai mis Joséphine en mouvement. Il lui faut une minute quinze secondes et 25 oscillations pour frapper son premier coup, et 4 minutes pour s’arrêter…

Tous mes remerciements au Père Iratzoquy, recteur jésuite de la basilique Saint Régis, affectataire, ainsi qu’à l’Éric Desmarquets, campaniste, pour la confiance qu’ils m’ont témoignée et l’honneur qui m’est fait de sonner ainsi entre ciel et terre cette cloche monumentale. Sans oublier Christian, qui m’a filmé en cet effort.

Fabien HAUG

Un témoignage de l’ascension du clocher

La veille de la solennité de sainte Thérèse Couderc, j’ai été invitée par le carillonneur à assister à la spectaculaire sonnerie « à la main » ou plus exactement au pied… et à la jambe qu’il est impératif d’avoir puissante et très musclée !… Tout commence avec l’ascension du clocher, par un escalier de bois qui se rétrécit au fur et à mesure. Et l’énorme masse de bronze apparaît. Le sonneur, Fabien, m’a conseillé de monter encore plus haut par une rudimentaire échelle, pour mieux entendre ! Mais, craignant d’être pulvérisée par les décibels et le souffle de ce pacifique « monstre », j’ai pris peur et suis redescendue au pied de Joséphine.

Fabien a acrobatiquement escaladé les structures de bois et d’acier qui maintiennent savamment cette masse… Notre sonneur m’a dit qu’il priait toujours avant de commencer : cette cloche est censée représenter la voix de Dieu et demander des grâces pour tous ceux qui l’entendront. Puis Fabien a entamé le puissant et périlleux exercice : cramponné à une barre, à moitié au-dessus du vide, l’homme doit peser de tous son poids, pour actionner une sorte de planche basculante, qui peu à peu met le bourdon en mouvement. Au bout d’une bonne vingtaine de fois, le premier « gong » retentit. Et, en poursuivant l’effort, le battant vient frapper les deux faces… Ding-dong… Ding-dong… Le spectacle et le son sont éblouissants, mais en rien assourdissants ! On est, au contraire, joyeusement impressionné.

Sans relâcher son effort, Fabien a sonné presque un quart d’heure ! … à toute volée… Puis il a laissé Joséphine se balancer toute seule, decrescendo. Mais impossible de redescendre avant que les six tonnes ne soient totalement immobilisées… J’ai admiré notre Joséphine…

Merci et félicitations au sonneur ! E. A.
n° 1247

1er septembre 2013

En savoir +

La basilique de Lalouvesc est de style néo-byzantin de la fin du XIXème siècle. Elle est dédiée à Saint François Régis, mort à Lalouvesc en 1640 et abrite ses reliques. Depuis lors, Lalouvesc est un grand centre de pèlerinage, Saint-François-Régis étant le saint-patron du Vivarais et du Velay. Lalouvesc abrite aussi la dépouille de Sainte Thérèse Couderc, fondatrice des Sœurs du Cénacle.

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