Pierre Chongk sj fait partie de la communauté jésuite à Athènes : il est curé de la paroisse du Cœur du Christ Sauveur et il collabore au Centre Arrupe qui accueille les personnes migrantes et exilées. Il revient sur son parcours multiculturel et sa vocation qui l’ont conduit à rejoindre la Compagnie de Jésus.

Pierre Chongk sj Né à Séoul en 1977, je suis arrivé à Athènes à l’âge de 7 ans. Après mes études secondaires, j’ai travaillé dans le restaurant de mes parents, puis j’ai fait mon service militaire en Grèce. Je suis entré au noviciat jésuite en 2000 et j’ai été ordonné prêtre dix ans plus tard

« Être ou ne pas être ? »

Cette phrase de Shakespeare dans Hamlet exprimait bien mon inquiétude intérieure avant d’entrer au noviciat. Ce thème est constant dans ma vie : je suis né dans un pays marqué par le confucianisme avec la tradition, l’honneur, la discipline, le devoir… En Grèce, j’ai appris à questionner comme les philosophes, à être curieux comme les premiers historiens Hérodote et Thucydide, à me battre pour ce en quoi je crois comme Ulysse… Héritier de tous ces éléments culturels merveilleux, je me suis trouvé à 17 ans devant une aporie : « Qui suis-je ? ».

« Connais-toi, toi-même »

Pendant trois ans, j’ai essayé de trouver la réponse à cette question et c’est un dimanche, en allant à l’église, que Dieu m’a illuminé de sa réponse : dans l’assemblée, il y avait des Grecs, des Philippins, des Albanais… J’ai été frappé par cette diversité. Au moment de réciter le Notre Père, j’ai compris que nous étions tous fils et filles de Dieu. J’ai senti alors une consolation forte, une présence de Dieu comme Père qui serrait dans ses bras tous ces gens. J’ai compris que nous faisions tous partie d’une grande famille mondiale sous le regard aimant de Dieu notre Père. C’était aussi ma première expérience de l’Église catholique. Cette identité nouvelle de la filiation avec Dieu a réconcilié toutes les cultures que je portais en moi.

« Qui suis-je pour vous ? »

Les Exercices spirituels de trente jours durant mon noviciat m’ont ouvert à la question posée par le Christ lui-même : « Qui suis-je pour vous ? ». J’ai alors pu répondre : « Tu es mon Seigneur et Compagnon de route ».

« À la rencontre des autres, de Dieu et de moi-même »

Ces trois découvertes m’ont amené à partager cette richesse à travers les Exercices spirituels, et surtout la relecture spirituelle aux enfants du catéchisme, lors de ma régence. Les jeunes, venant d’Albanie, Roumanie, Pologne ou Bulgarie, vivaient une tension entre leur culture et la culture grecque. Je voulais les aider en leur montrant qu’à travers la foi, et avec la grâce de Dieu, on peut réconcilier les deux et se découvrir soi-même. À partir de là, ils pouvaient entrer à petits pas dans une intimité avec Dieu.

Créer des ponts entre les gens qui portent en eux différentes cultures, c’est le cœur de ma mission encore aujourd’hui, aussi bien dans notre paroisse qu’au centre Pedro Arrupe, à travers le soutien scolaire aux enfants réfugiés et immigrants.

Grâce à Dieu et à la Compagnie de Jésus, j’ai pu me connaître moi-même, découvrir une famille universelle, pour enfin rencontrer des enfants de Dieu prêts à se découvrir eux-mêmes en Dieu. Cette recherche de soi, qui rejoint celle de Dieu, ne s’arrêtera jamais et restera comme un désir brûlant jusqu’au jour où nous nous rencontrerons tous autour de Jésus Christ, notre premier Compagnon.


Cet article a paru dans la revue Échos jésuites (printemps 2023), la revue trimestrielle de la Province d’Europe Occidentale Francophone. L’abonnement, numérique et papier, est gratuit. Pour vous abonner, merci de consulter ce lien.

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