Visite du pape François en Afrique : analyse de Matthew Ippel sj

Du 31 janvier au 5 février, le pape a réalisé un voyage apostolique en République Démocratique du Congo et au Soudan du Sud. Matthew Ippel sj revient sur la visite au Sud-Soudan.

Du 3 au 5 février, le voyage du pape François au Sud-Soudan, la plus jeune nation du monde, présentait toutes les caractéristiques d’une visite papale. Pourtant, quelque chose différait, dans le ton des discours, dans une dimension œcuménique sans précédent et dans un sentiment d’espoir pour la paix retrouvé.

Les interventions du Saint-Père comparent le processus de paix au calme et puissant courant du Nil qui traverse le pays, exprimant la proximité du pape François avec ceux qui subissent les violences, notamment les femmes et les personnes déplacées. Les comportements brutaux et endémiques qui ont éclaté le long des lignes ethniques en 2013 se sont répercutés dans la capitale, point zéro de la guerre civile : elle a fait près de 400 000 morts et 4 millions de déplacés, la plus grande crise de déplacement en Afrique actuellement. Les violences intercommunautaires et un conflit humanitaire terrible sont aggravés par l’insécurité alimentaire chronique, la corruption et les inondations dues au changement climatique. Exhortant les dirigeants de la nation, le pape François a déclaré : « Assez de sang versé, assez de conflits… assez d’abandonner le peuple assoiffé de paix. Assez de destructions, c’est l’heure de la construction ! »

L’originalité de ce voyage réside aussi dans la nature profondément œcuménique de cette visite papale, unissant trois leaders chrétiens (le pape François ; Justin Welby, archevêque de Canterbury ; lain Greenshields, modérateur de l’Assemblée générale de l’Église d’Écosse) dans un front commun pour la paix et la réconciliation, implorant les dirigeants de la nation et son peuple de s’unir pour mieux vivre les différences ethniques, prétexte et source de division intercommunautaire.

© Antonio Spadaro sj

Le pape François a enfin renforcé l’espoir déjà ardent dans le cœur et les actions de la population. En témoigne le geste d’un jeune garçon, posé avec éloquence et simplicité : quittant la cathédrale de Juba, il a offert un billet au Saint-Père, évoquant la parabole de la pauvre veuve qui, avec ses deux pièces de monnaie, donne tout ce qu’elle a, image du peuple sud-soudanais continuant, lui aussi, à donner ce qu’il a pour la paix, jusqu’à la vie de certains de ses membres.

Dans leur pèlerinage œcuménique pour la paix, le pape François et les autres dirigeants chrétiens ont embrassé la joie des Sud-Soudanais et se sont fait l’écho de leur profond désir de paix. Au-dessus de l’immense foule des personnes rassemblées pour la visite œcuménique à Juba, des affiches indiquaient « Que tous soient un » (Jn 17,21). Une prière à laquelle nous pouvons tous nous associer, pour nos Églises, pour notre humanité et en particulier pour les Sud-Soudanais.

Matthew Ippel sj (Communauté Pedro Arrupe à Vanves)

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