Ils sont connus comme « les martyrs du Zenta », une région peu connue du nord-ouest de l’Argentine. Un jésuite originaire de Sardaigne, Giovanni Antonio Solinas et un prêtre diocésain, don Pedro Ortiz de Zárate, ont été béatifié le 2 juillet 2022 en Argentine. Tous deux se sont donnés corps et âme au service de l’évangélisation des peuples indigènes au temps des « missions jésuites » au XVIIème siècle. D’autres chrétiens, dix-huit en tout, ont aussi donné leur vie dans le contexte de cette mission.

Giovanni Antonio Solinas 2

© Facebook – Jesuitas Argentina y Uruguay

Giovanni Antonio Solinas béatifié dans la région du Zanta, au nord-ouest de l’Argentine, a manifesté une disponibilité peu commune pour le service de l’Évangile. Né en 1643 en Sardaigne, il entre dans la Compagnie de Jésus à Cagliari en 1663. Il fait des études de théologie à Séville et, dès après son ordination en 1673, il est envoyé dans la Province du Paraguay qui couvre alors un très large territoire (sud du Brésil, nord de l’Argentine, l’Uruguay et une partie de la Bolivie).

Au service de l’évangélisation et de la promotion sociale des guaranis

Dans la lettre qu’il a envoyée à l’occasion de cette béatification, le P. Arturo Sosa sj, Supérieur Général, souligne les défis que pouvait représenter la région du sud de la Bolivie au nord-ouest de l’Argentine. Les divers peuples sont souvent en conflit les uns avec les autres. Les relations entre les colons espagnols et les autochtones sont tendues et les missionnaires doivent proposer l’Évangile dans un contexte d’injustices et de luttes fait de résistance acharnée des Amérindiens et de répression armée :

Giovanni Antonio Solinas a fait savoir sa disponibilité pour évangéliser ces communautés et demeurer avec elles, sans les abandonner et en leur procurant « la nourriture nécessaire et toute autre forme d’aide possible ». Selon un contemporain, Giovanni Antonio Solinas – dévoué, familier de la souffrance, doux et avenant de caractère, très aimé de ses compagnons – « était un soutien pour les pauvres auxquels il donnait nourriture et vêtement, un médecin pour les malades qu’il soignait avec une grande délicatesse, et un remède universel pour tous les maux corporels. C’est pourquoi les Indiens éprouvaient une affection filiale à son égard ». (…)

L’expédition missionnaire organisée en 1683 par le Père Ortiz de Zárate se propose de faire la paix avec les groupes indiens qui ont franchi les frontières de Jujuy et de parvenir à réconcilier les colons et les peuples autochtones. Trois jésuites participent à l’expédition qui a traversé la vallée du Zenta (aujourd’hui Orán), à l’est de Jujuy, dont le P. Juan Antonio Solinas. 

Alors qu’ils célèbrent la paix, quelque cinq cents Indiens Tobas, Mocovies et Mataguayos arrivent avec plusieurs caciques et se mettent à les encercler et à les menacer pendant plusieurs jours. Au matin du 27 octobre 1683 les prêtres prient et célèbrent l’eucharistie. Puis ils parlent de Dieu à leurs assiégeants, sur un ton amical. L’après-midi, apparemment encouragés par les sorciers de leurs clans, les assiégeants attaquent les missionnaires et tous ceux qui les accompagnent avec des flèches, des lances, des gourdins et des matraques, et ils les tuent cruellement. Selon le rapport d’un Indien de la mission qui a pu fuir à cheval, le Père Diego Ruiz a arrêté les troupes espagnoles, arrivées de Salta pour faire justice, en leur disant : « Nous sommes venus convertir les infidèles, pas les tuer ».

L’inculturation, une voie de sainteté, qui requiert l’ascèse, la prière et le martyre

Le P. Arturo Sosa sj ajoute dans sa lettre :

Giovanni Antonio Solinas « Les origines européennes de Giovanni Antonio Solinas nous rappellent la manière dont, depuis toujours, la Compagnie de Jésus a privilégié les lieux de mission où l’urgence est la plus grande, en y envoyant des jésuites originaires de divers pays, quelle que soit la distance (d’ordre géographique ou liée à des usages ou coutumes) qui les sépare de leurs lieux de destination. La manière dont ils se sont défaits des usages acquis dans leur patrie et dont ils se sont inculturés ici ou là leur a permis de communiquer l’Évangile d’une manière adaptée aux nécessités et aux contextes dans lesquels vivaient ceux qui le recevaient. Cela suppose du missionnaire – comme nous l’avons vu dans cette mission de Zenta – des qualités et des vertus présentes particulièrement chez Giovanni Antonio Solinas. Ces traits de caractère n’apparaissent pas à l’improviste, mais ils naissent et grandissent dans le souci quotidien de l’amour de Dieu et du prochain, dès l’enfance comme durant le temps de formation du jésuite.

La fidélité de ces martyrs à persévérer dans leur engagement pour la réconciliation entre les différents groupes locaux, en étant prêts à donner leur vie pour eux et à pardonner à leurs agresseurs, nous permet de percevoir la hiérarchie de leurs valeurs chrétiennes. Par ailleurs, l’attention à la personne qui caractérise Giovanni Antonio Solinas et ses compagnons en tant que médecins du corps et de l’âme montre clairement comment l’action évangélisatrice menée avec la grâce de Dieu, fait droit aux aspirations de tout être humain, par la communication de la vie intégrale qu’offre Jésus-Christ. »

> Source : site internet de la Curie générale à Rome

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