JRS France : ouverture d’un lieu d’accueil pour prendre soin des demandeurs d’asile à une étape décisive de leur parcours

Le JRS France (Jesuit Refugee service) a ouvert fin février, à Fontenay-sous-Bois, un lieu pour accueillir les demandeurs d’asile le jour de leur entretien à l’OFPRA, baptisé l’Oasis. Sandra Jouandeau, responsable de programme et Guillemette Belpaire, chargée de mission, présentent ce lieu de répit pour des personnes éprouvées et fragilisées.

Quel est l’origine de ce projet ?

Quel que soit l’endroit où ils vivent en France, tous les demandeurs d’asile doivent se rendre à l’Office Français de protection des réfugiés et apatrides (OFPRA) situé à Fontenay-sous-Bois (94) pour passer leur entretien d’asile. Quelques rues plus loin se trouve aussi la Cour nationale du droit d’asile (CNDA) qui est le second et ultime recours quand l’OFPRA a donné une réponse négative.

Cet entretien est un moment décisif où ils sont très vulnérables. Ils vont être amenés à partager leur récit de vie et relater des événements parfois traumatiques de leur parcours migratoire, lors d’un entretien qui peut durer entre une et quatre heures. L’officier de protection va déterminer la véracité de leur récit, et donc la possibilité de leur octroyer ou non le statut de réfugié. Ils se retrouvent ensuite très seuls, sans savoir si l’entretien aboutira à une réponse positive, la réponse intervenant plusieurs semaines après l’entretien.

Pour venir, les demandeurs d’asile voyagent, en bus ou en train, souvent le jour-même, parfois la nuit précédant leur entretien. Certains, sans hébergement en région parisienne, sont contraints de dormir à la rue la veille de cette étape décisive qui décidera de leur vie future (réfugiés ou déboutés du droit d’asile). A leur arrivée devant l’OFPRA, ils sont donc très stressés et éprouvés physiquement comme mentalement. Seuls ou en famille, ils peuvent arriver à 5h00 du matin, pour un entretien à 9h00 ou 14h00, et n’ont aucun endroit pour se poser, se mettre à l’abri ou même se restaurer avant cette étape.

Devant de telles situations d’indignité et d’inhumanité, qui mettent au surcroît à mal les conditions mêmes d’exercice du droit d’asile, JRS France a donc initié le projet d’ouverture d’un lieu de répit afin de permettre aux personnes de passer cet entretien dans de meilleures conditions. En interrogeant au préalable les demandeurs d’asile, dans le cadre d’enquêtes de terrain, plusieurs besoins sont ressortis :  manger et boire, prendre une douche, mais aussi se (re)poser, prendre soin de soi, être entouré. Beaucoup ont évoqué le souhait de pouvoir prier, se recueillir, méditer avant cette étape clé.

A quoi ressemble ce lieu et qui accueillez-vous ?

Nous disposons d’un local de 186 m2 à Fontenay-sous-Bois situé à 5 minutes de l’OFPRA. Avec l’expertise et le soutien mobilier d’AXA, nous avons pu aménager des espaces distincts : un espace tisanerie où l’on peut se restaurer, propice aux échanges et rencontres informelles, un espace répit où l’on peut se reposer, un espace recueillement où l’on peut prier quelle que soit sa religion, un espace hygiène et beauté, où l’on peut se doucher ou se brosser les dents, un espace médiathèque où sont animés des ateliers d’art thérapie. Une psychologue est également présente sur le lieu pour des temps d’échanges plus confidentiels destinés aux personnes confrontées à un stress important.

Du fait d’une jauge, nous pouvons accueillir une trentaine de personnes chaque jour (en matinée et un après-midi par semaine), parmi les 400 demandeurs d’asile qui passent les entretiens chaque jour. Cela permet de nouer des relations de qualité entre les personnes accueillies et les bénévoles/ salariés.

Au-delà des services matériels qui y sont rendus, cet espace est d’abord un lieu où l’on prend soin. Où chaque personne est accueillie pour elle-même avec une grande attention.

Qui sont les partenaires de ce projet ?

Ce projet ne s’est pas fait en un jour : la réflexion a été initiée en 2021 – pendant le Covid – avec le P. Antoine Paumard, jésuite et ancien directeur du JRS. Nous avons pu bénéficier d’un lieu vacant appartenant à la congrégation Notre-Dame qui s’est montrée très favorable à ce projet et patiente. Il a fallu comprendre les besoins des personnes, lever des obstacles réglementaires et administratifs, constituer une équipe, trouver des ressources… Nous nous sommes associés à la Croix Rouge Française qui apporte son savoir-faire opérationnel, ses ressources humaines, sanitaires et sociales, et complète l’accompagnement des demandeurs d’asile avec la présence d’une psychologue mais aussi d’une art-thérapeute qui permet de proposer des activités artistiques.

JRS a mis en lien et fédéré tous les acteurs du projet. Nous sommes l’une ou l’autre présentes trois jours par semaine sur le lieu en tant que coordinatrices. Le projet bénéficie d’une forte mobilisation puisque plus d’une cinquantaine de bénévoles ont répondu présents. Nous avons instauré un temps de débrief à la fin de chaque service bénévole, avec une relecture des moments vécus, précieuse pour les équipes. Nous vivons là, concrètement, les valeurs du JRS, qui sont celles de l’accueil, de l’écoute et de l’attention humaine.

Ce projet est aussi possible grâce à Axa Banque, dont les locaux font face à l’OFPRA. Notre partenaire a largement contribué à l’avènement de ce projet par son expertise, son soutien financier et logistique, et le don du mobilier pour l’aménagement de l’espace. Des salariés, touchés par les files d’attente, sont devenus bénévoles pour l’accueil des demandeurs d’asile.

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