8 mars : en cette journée internationale des droits des femmes, Vincent Klein sj propose de se remémorer la vie de quelques femmes qui ont marqué l’histoire de l’Eglise. Sainte Odile, Herrade de Lansberg… les femmes théologiennes érudites et influentes dans l’Eglise ne datent pas d’aujourd’hui.
À l’heure où l’Eglise s’interroge sur la place -ou plutôt le peu de place- laissée aux femmes dans ses structures de gouvernement, à l’heure où le pape et des épiscopats prennent des décisions certes bien modestes, mais ô combien symboliques, valorisant la parole des femmes et les intègrant aux structures de décision dans l’Eglise, à l’heure où cette même Église commence à se dire qu’associer hommes et femmes, laïcs, prêtres, religieux et religieuses aux instances décisionnelles et le faire de manière structurelle n’est pas une menace -sauf pour ceux qui sont enfermés dans le cléricalisme- mais bien plutôt une source d’enrichissement mutuel qui ne peut que rendre l’Église plus conforme à l’Evangile, à la Bonne Nouvelle annoncée par le Christ, à l’heure où certains renâclent ou prennent peur face à ces soi-disant nouveautés, il est bon de se remettre en mémoire quelques grandes figures de femmes dans l’histoire de l’Eglise, à commencer par Sainte Odile dont nous fêtons le… 1300 anniversaire de la mort.
Odile, fondatrice et première abbesse de l’abbaye au sommet du mont qui porte désormais son nom, se détache de manière impressionnante du rocher qu’elle domine. De la main droite, elle bénit la plaine d’Alsace et de la gauche, elle tient en main une… crosse ! Ce bâton de pasteur, généralement réservé aux évêques, est aussi l’apanage au Moyen-Âge d’abbés ou d’abbesses d’abbayes importantes. Il conférait à ces abbés et abbesses un rang d’évêque, dans le sens où ils/elles ne dépendaient d’aucun pouvoir épiscopal local et étaient avec eux sur pied d’éga lité !
Je pense aussi à Herrade de Lansberg qui, abbesse de Sainte Odile au 12e siècle à la suite de Relinde, était une grande érudite tant en lettres -elle écrivait des poèmes !- qu’en théologie, en botanique et dans bien d’autres domaines encore. Son chef d’œuvre, le « Hortus Deliciarum », malheureusement brûlé dans l’incendie de la bibliothèque de Strasbourg en 1870, mais en grande partie reconstitué depuis, était un manuel exclusivement destiné à des femmes, en l’occurrence aux moniales en formation dans l’abbaye. Oui, les femmes théologiennes érudites et influentes dans l’Eglise ne datent pas d’aujourd’hui. On l’a peut-être un peu vite oublié. Et c’est sans citer des figures plus connues comme Hildegard von Bingen ou Catherine de Sienne…
Il est bon de s’appuyer sur ces exemples pour avancer avec confiance sur le chemin, certes lent et long comme celui qui serpente de la plaine jusqu’au Mont Saint Odile, d’une participation plus large et diversifiée des femmes aux structures d’enseignement et de gouvernement dans l’Eglise. Souhaitons que les évêques et les prêtres n’y voient pas une remise en question de leur pouvoir, mais au contraire une chance de partager en Église les responsabilités et de donner à notre institution bi-millénaire un visage diversifié d’où pourra émerger le souffle et la vigueur dont elle a plus que jamais besoin !
Vincent Klein sj (Communauté jésuite de Marseille)