Le P. Thierry Dobbelstein sj, assistant du Provincial, partage sa méditation à l’approche de Noël quelques semaines après la publication du rapport de la CIASE.

Thierry Dobbelstein Avent Noël 2 Lors de la dernière Cène, Jésus annonce que l’un de ses disciples va le trahir. Les apôtres se mettent à lui demander, chacun son tour : « Serait-ce moi* ? » Cette réaction est un détail surprenant du récit évangélique. Il n’est pas écrit que les apôtres demandaient à leur voisin : « Serait-ce toi ? » Ils ne se désignaient pas l’un l’autre en demandant : « Serait-ce lui ? » Chacun demandait : « Serait-ce moi ? »

Ce petit détail résonne tout particulièrement alors qu’en France, la Commission indépendante sur les abus sexuels dans l’Église (CIASE) a publié son rapport. L’ampleur du problème est telle que chacun d’entre nous s’interroge : « Serait-ce moi ? » Nous, jésuites, n’avons pas tous abusé sexuellement d’un enfant ni d’une personne adulte qui se confiait à nous. Mais tous, nous nous demandons : « Qu’ai-je fait des témoignages que j’ai reçus ? Ai-je offert assez d’attention à la personne qui balbutiait un appel au secours ? Ai-je suffisamment pris au sérieux les cris de ceux qui hurlaient leur souffrance ? Ai-je échappé aux mécanismes de déni ou de minimisation ? Ai-je préféré détourner le regard, conseiller la discrétion, balayer sous le tapis ? » Il y a eu tant d’injustices et de cas d’agressions sexuelles que chacun d’entre nous – jésuite ou non jésuite – peut avoir été témoin ou avoir vécu dans son entourage un cas d’abus particulier. « Serait-ce moi ? Moi aussi j’aurais trahi en ne voulant pas voir, en ne voulant pas entendre, en n’osant pas dénoncer, en n’aidant pas à parler ? »

À Noël, notre Dieu nous rappelle tout particulièrement combien il s’identifie au plus humble, au plus fragile : « Tout ce que vous avez fait au plus petit, c’est à moi que vous l’avez fait ». Noël ne nous invite pas à la culpabilité, encore moins à la paralysie. Noël est invitation pour aujourd’hui et pour demain. Invitation pour l’année 2022 à nous retrousser les manches, pour faire de l’Église une « maison sûre » pour toutes et tous, en particulier pour les plus petits. Merci de nous aider à transformer notre culpabilité en engagement et en actions.

P. Thierry Dobbelstein sj,
Socius de la Province EOF

Notes

* Mt, 26,22.

Cet article a paru dans la revue Échos jésuites (hiver 2021), la revue trimestrielle de la Province d’Europe Occidentale Francophone. L’abonnement, numérique et papier, est gratuit. Pour vous abonner, merci d’envoyer votre mail et/ou votre adresse postale à communicationbxl [at] jesuites.com.

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