« Évangile de Dieu, bonheur pour le monde » est le dernier chant écrit par Didier Rimaud. Il l’a terminé quelques jours avant sa mort.

Il l’avait fait porté depuis son lit d’hôpital au Cardinal Barbarin qui lui avait commandé ce travail. Cette hymne a été chantée pour la première fois le jour de ses funérailles à Lyon le 29 décembre 2003. Ci-dessus se trouve la partition originale pour le refrain. Ci-dessous le texte des couplets 1, 3 et 5, chantés le jour des obsèques.
1. Dans les tempêtes de la vie, l’Evangile de Dieu
est boussole pour le monde aujourd’hui :
son Évangile est Parole qui balise le chemin
vers le bonheur du Royaume qui vient !
3. Quand vient le temps de la douleur, l’Évangile de Dieu
est boussole dans l’épreuve et la peur :
son Évangile est Parole qui emporte tout le mal
dans la splendeur du cortège pascal !
5. Face au scandale de la mort, l’Évangile de Dieu
est boussole car l’espoir est plus fort :
son Evangile est Parole annonçant que Jésus-Christ,
ressuscité, nous entraîne avec lui !

Hommage au Père Didier Rimaud dans le  Journal La Croix du 29 décembre 2003

Décédé le 24 décembre 2003, ce jésuite poète et compositeur, dont les cantiques sont chantés dans toute les églises de France, travailla dans la lignée de Vatican II.

C’est la veille de Noël, le 24 décembre, que, dans son sommeil, le P. Didier Rimaud , jésuite et poète, à qui l’on doit cette Prière au nom de la Vierge à la crèche (Les Arbres dans la mer, Desclée) s’est éteint. Lorsque Pierre Faure, jésuite, qui travaille au Centre national de pastorale liturgique, fit, à 14 ans, la connaissance du jeune P. Rimaud , déjà, il grattait la guitare et faisait des chansons  » mêlant poésie et mystique « .

Jusqu’au bout, Didier Rimaud aura servi le chant liturgique, et certains de ses cantiques sont aujourd’hui des  » classiques  » des assemblées du dimanche : Fais paraître ton jour, Que tes œuvres sont belles, Au cœur de ce monde, Si le Père vous appelle… Il avait confié quelques jours avant sa mort à l’un de ses proches :  » Je me prépare à aller chanter avec mes amis Jacques Berthier, Christian Villeneuve et Patrice de La Tour du Pin. Mais écrire est aujourd’hui pour moi devenu d’un autre monde. « 

Didier Rimaud appartenait à une famille lyonnaise de bourgeoisie militaire. À Carnac, où il est né et dont il a parcouru les plages depuis la maison familiale,  » Didier était fasciné, se souvient encore Pierre Faure, par le bruit des vagues qui était pour lui le plus ancien bruit du monde « . Si l’entrée de Didier Rimaud dans la Compagnie de Jésus juste après le bac et des années de scoutisme correspondait à une trajectoire classique et conforme à son milieu social, il n’a pas le goût ni le profil du travailleur intellectuel forcené. Qu’importe, Didier a d’autres cordes à son arc, ou plutôt sa guitare !

Nous sommes alors dans la période préconciliaire. Comme le P. Paul Couturier décide de faire appel pour la chapelle du plateau d’Assy aux plus grands artistes de l’époque, le Père jésuite Bernard Geoffroy a la même intuition en matière de chant liturgique : faire écrire des grands ! Didier Rimaud , entre quelques cours de français et beaucoup d’heures de surveillance dans le collège jésuite de Marseille où enseigne le P. Geoffroy, entend l’appel. Ainsi naîtra la fameuse collection de recueils de chants Gloire au Seigneur (Seuil).

Dès lors Didier Rimaud ne quittera plus ce service de la liturgie qu’il exercera par la voie de l’expression artistique, au Centre national de pastorale liturgique, et à la revue Église qui chante. Mais de toutes ces années données à l’Église, sans doute l’œuvre la plus ingrate, parce que la plus colossale, fut sa participation à la traduction du latin en français de tous les rituels liturgiques catholiques, à la suite de la réforme de Vatican II.

 » Un véritable événement littéraire, et la création d’un corps verbal que Didier Rimaud ne trouvait pas honorée à sa juste valeur, rappelle Pierre Faure. Pour la première fois depuis l’origine du christianisme en France, il fallait créer une langue pour la prière de tous, compréhensible pour la femme de ménage comme le diplômé de Normale-Sup ! « 

Dès lors, et jusqu’au bout, c’est lui qui enseigne aux novices jésuites la prière des psaumes et de la liturgie, avec toute sa sensibilité d’artiste et de priant. Car sa foi était profonde. Dans les années 1970, quand la Compagnie de Jésus est chahutée, comme toute l’Église, celui qui était entré sur des rails et avait vécu dans des grandes communautés où tout semblait marcher à coups de discipline, dit volontiers à des proches  » qu’il est entré de nouveau dans la vie religieuse « .

Aux dires de ses proches, Didier Rimaud s’impatientait devant la raideur de certaines réactions de la Congrégation du culte divin. En revanche il souhaitait que l’Église soit plus inventive, notamment dans le domaine des ministères. Enfin, ce poète des temps modernes adhéra pleinement à l’option préférentielle pour les pauvres que les jésuites ont inscrite comme ligne d’action prioritaire sous le gouvernement du P. Pierre Arrupe en 1976. Apprenant que l’on avait chanté à la messe plusieurs de ses chants mentionnant le combat pour la justice, il a dit :  » Moi qui n’ai rien fait directement pour la justice, je suis heureux qu’au moins par mes textes je puisse servir les pauvres.  » Des chants qui serviront encore.

Agnès AUSCHITZKA

Didier Rimaud, poète et artiste

Didier était d’abord un artiste aux talents multiples, sensible et joueur, amoureux de beauté et de musique. Dès sa jeunesse il peint des aquarelles, écrit des poèmes, sculpte le bois, collectionne les coquillages, passe du temps à improviser au piano (il dit lui-même (1) : « plus de temps qu’à apprendre la grammaire allemande ou les verbes irréguliers grecs… » ), étudie le violon pendant douze ans. Devenu jésuite à 19 ans, puis en stage au collège de Marseille, il chante dans la chorale du Père Geoffroy Les petits chanteurs de Provence et parcourt pas mal de pays en tournée de concerts avec eux. Dans les années 50, il apprend la guitare d’accompagnement pour chanter ses premières chansons dont il écrit texte et musique, et publie même deux disques.

Certes, comme religieux jésuite, et membre du Centre National de Pastorale liturgique pendant quarante ans, l’essentiel de son oeuvre est d’écrire des textes pour la liturgie. Mais pour le plaisir de jouer avec les mots il écrit aussi des comptines pour les enfants dont beaucoup sont encore inédites. Et pendant tout ce temps on le voit régulièrement appelé par des communautés comme conseiller et parfois créateur, pour le réaménagement de leur chapelle, le changement de l’autel, le choix des couleurs, des sièges, des tissus, etc. Au noviciat de l’Arbalétière (au nord de Lyon) où il a vécu de nombreuses années jusqu’à sa mort (le 24 décembre 2003), l’autel de la chapelle de communauté est habillé d’une tapisserie dont Didier a fait lui-même le carton. Longtemps, à la chapelle de la maison de la Baume à Aix-en-Provence (qui fut noviciat de 1952 à 1967) de même qu’à l’église Saint-lgnace à Paris, une longue tapisserie provenant d’un dessin de Didier était placée au-dessus du tabernacle.

Manifestement l’ambiance familiale fut propice au développement des talents et de la sensibilité artistiques de Didier. Il en parle volontiers lui-même : « A la maison, mon père et ma soeur aînée jouaient du piano. J’aimais bien, pour entendre la musique, me lover en chien de fusil, sur le parquet, contre le bois d’ébène de ce piano noir. Ma mère nous apprenait toutes les vieilles chansons françaises et, bien sûr – Bretagne oblige ! – celles de Théodore Botrel. C’est merveilleux tout ce qu’à l’intérieur d’une famille nombreuse – nous étions huit frères et soeurs – on peut apprendre de sa mère pendant les vacances le nom des arbres, des fleurs, des poissons, des phares, des constellations, le mystère des chapelles bretonnes près des sources ; comment on fait des colliers de coquillages ; comment on fait des chansons pour les fêtes ; comment on rend grâce pour un dessert de fraises ou de trop-de-crêpes ! Le bonheur quoi ! Et comment l’amour qui est donné permet de passer à travers les épreuves : ma soeur aînée morte à 18 ans, deux frères tués, l’un en Indochine et l’autre en Algérie. Mon père, officier, était plus silencieux. Pour des fêtes de famille, il mettait en musique des poèmes que chantait ma mère et qu’il accompagnait au piano. Je garde dans mes trésors un cahier où il avait recopié de sa main des poèmes que j’avais écrits vers 18 ans et qu’il avait trouvés quand j’avais quitté la maison pour le noviciat. Cette sorte d’approbation muette du père conforte le fils encore aujourd’hui. »

Le 6 août (fête de la Transfiguration) 1922, Didier est né à Carnac (Morbihan), comme le grand poète Eugène Guillevic. A Carnac car c’est le lieu de la maison de vacances de sa famille, pourtant la plus lyonnaise qui soit. Mais lorsqu’on demandait à Didier : « D’où êtes-vous ? », il répondait toujours « de Carnac », et jamais « de Lyon » où il a pourtant vécu toute sa jeunesse puis de nombreuses années en communauté jésuite. A Lyon le travail et les études, à Carnac les vacances, les jeux, la mer : « Je suis né au mois d’août dans une maison d’où l’on voit l’océan par toutes les fenêtres. Je suis sûr que le premier bruit du monde que j’ai entendu est celui des vagues déferlant sur la plage à moins de cent mètres… Je suis retourné à Carnac tous les ans, pour les vacances d’été, jusqu’à la guerre de 1940 et mon entrée au noviciat. Je dois bien porter quelque part en moi ce lieu de naissance et de vacances… ». En effet, il n’est pas difficile de trouver dans les textes de Didier la trace de la vie à Carnac.

Le jésuite

C’est dans les chansons qu’il composa vers l’âge de 30 ans que transparaît pour la première fois la prière de Didier et sa compréhension du mystère de la souffrance et de la Pâque du Christ. Parmi une dizaine de chansons parlant du Christ, la majorité contemplent le Christ en croix et ses souffrances. Mais sans jamais aucune complaisance ni fascination. D’ailleurs la qualité des images et l’élégance du langage ne le permettent pas. De ce point de vue on reste impressionné par la densité de « Amour me tient ».

Familier des psaumes et infatigable traducteur et commentateur du psautier, Didier connaît le cri des pauvres : « Un pauvre crie; le Seigneur entend il le sauve de toutes ses angoisses. » (Ps. 33, 7). Mais en 1976, la 32ème Congrégation générale des jésuites orientait plus nettement sa mission au service des pauvres et de la justice sociale, et cette option marquera Didier qui s’en explique : « Les orientations de la Compagnie de Jésus, formulées par le Père Arrupe, invitant à ne pas séparer l’annonce de la foi de la promotion de la justice, ont germé sur un terrain fécondé par les psaumes. C’est une option dont je me sens très partie prenante, même si je ne travaille pas moi-même dans les camps de réfugiés de Thaïlande ou du Rwanda. Elle m’occupe le coeur, elle m’obsède et c’est pour moi une grande joie d’entendre une communauté adopter des chants tels que :

Peuple d’un Dieu qui est justice
en prenant soin des plus petits,
ta seule gloire est le service,
l’amour de ceux que l’on oublie.
Invente avec ton Dieu
l’avenir qu’il te donne,
Invente avec ton Dieu
tout un monde plus beau.
Le Fils de l’homme est plein de grâce,
Quand il descend chez les pécheurs.
Fais comme lui et prends ta place,
Sous la livrée du serviteur. Invente avec ton Dieu… »

Le traducteur liturgique

Pendant tout le temps où Didier a travaillé dans l’équipe du CNPL, une grande partie de son travail a été de collaborer aux groupes qui ont traduit du latin en français tous les rituels de la liturgie catholique. D’abord la première édition à la suite du Concile Vatican Il, puis les éditions successives. Quelques semaines avant sa mort Didier travaillait encore pour les oraisons du rituel des funérailles rénové. Ce travail est technique, long, anonyme puisque aucune traduction n’est signée. Didier parle de son travail pour le rituel des ordinations publié en 1996 :

« Dans le groupe des traducteurs ma responsabilité était de veiller, avec d’autres, à la fois à la fidélité au texte original et à la qualité du texte produit, tout en examinant les nombreuses remarques des évêques consultés. C’est un travail austère. Mais quelle joie d’entendre un jour ce texte sur les lèvres d’un évêque célébrant une ordination dans sa cathédrale ! […]

Vous imaginez bien que l’on se trouve aussi payé de sa peine, quand on entend le pape Jean-Paul II, lors de son voyage en France, utiliser la nouvelle traduction de la prière eucharistique pour des circonstances particulières, juste sortie de nos ateliers ! »

Le travail sur les textes liturgiques n’est pas que traduction, il a été aussi création. Didier a contribué à la rédaction d’au moins une prière eucharistique pour la réconciliation, et aux prières eucharistiques pour les assemblées avec enfant, ainsi qu’à des oraisons nouvelles dans le Missel.

La traduction de la Bible pour la liturgie a été un très gros chantier. Didier a fait partie du groupe qui a mis au point la traduction litur­gique du psautier qui se trouve depuis 1977 dans tous les lectionnaires et livres liturgiques catholiques de langue française. Il a été aussi le principal rédacteur des oraisons psalmiques qui suivent chaque psaume de ce psautier.

Le premier chantier de traduction liturgique de la Bible après le Concile Vatican Il s’était limité aux textes bibliques sélectionnés par la liturgie. Une grande partie de l’Ancien Testament n’avait donc pas été traduite pour l’usage liturgique. Un grand chantier s’est attaqué à ce travail dans les années 90, qui est maintenant quasiment terminé. Didier y a collaboré à la traduction de plusieurs livres de l’Ancien Testament comme « littéraire » auprès des exégètes pour aider à trouver la juste formule en français, fidèle à l’original, et compréhensible à l’oreille pour les fidèles en célébration qui n’ont pas le texte en mains.

L’auteur de textes de chants liturgiques

C’est encore à Marseille où il travaille au collège comme étudiant jésuite que Didier écrit texte et musique de son premier chant pour la liturgie :

Seigneur, venez, la terre est prête pour vous accueillir.
Seigneur, venez, sur nos sillons le grain peut mûrir.
Car toute chair attend le Verbe de Dieu.
Qu’à notre désir enfin se rouvrent les cieux.
Mon Dieu, que votre règne arrive ! (E 20)

Il sera publié en 1952 dans le n° 2 des recueils Gloire au Seigneur, collection de nouveaux cantiques pour la liturgie lancée et dirigée par le Père Geoffroy et publiée aux éditions du Seuil. Et le plus récent recueil de chants pour la liturgie proposé par les évêques de France (Chants notés de l’assemblée, Bayard, 2001) a de nouveau sélectionné ce chant.

Dans les années 60, à la suite de la réforme liturgique du Concile Vatican II, tout un répertoire de chants liturgiques en français doit se mettre en place, et la demande de nouvelles compositions est grande et pressante. Didier écrira donc beaucoup, aussi bien pour les assemblées paroissiales que pour les communautés religieuses ou monastiques. Dans le livre de la Liturgie des Heures (l’ancien « bréviaire »), sur 267 hymnes proposées, 45 sont de Didier, réparties dans tous les temps et fêtes liturgiques. Certains textes sont tellement appréciés qu’ils sont mis en musique par plusieurs compositeurs. Ainsi pour chanter l’hymne « Voici la nuit » (P 156) on peut choisir entre huit musiques différentes. Didier étant de plus en plus connu et ses textes appréciés, des commandes viendront chant pour un synode diocésain, pour un rassemblement national d’un mouvement, pour une fête, un anniversaire de congrégation, etc.

Progressivement Didier travaillera de très près avec les musiciens qui composent sur ses textes, pour trouver avec eux les meilleures solutions pour la mise en place du lien texte / musique : Joseph Gelineau, Jo Akepsimas, Jacques Berthier, Michel Wackenheim, Marcel Godard, Henri Dumas, Etienne Daniel, Philippe Robert, Christian Ville-neuve, Jean-Michel Dieuaide. Pour des pièces plus originales, cantates, vigiles, vêpres, il travaillera aussi avec Jean-Pierre Legay, Français Vercken, Rager Calmel, Joseph Reveyron, Patrick Lamon, etc., et en Italie avec Paolo Rimoldi et Giovanni-Maria Rossi

Pourquoi écrire ?

« Quelque chose m’est arrivé, qui m’a surpris. Qui m’a invité au détour comme un buisson qui brûlerait sans faire de cendres. Par là, Dieu m’est advenu. Ou bien par là, je suis allé vers lui. J’ai crié, de douleur ou de joie, de honte ou de bonheur. Un cri d’abord sans voix. Peut-être un rugissement. Ensuite, il me faudra écrire le cri. Et pourquoi l’écrire ? D’abord pour rien, pour personne, pour moi. Pour garder en molle souvenir de ce qui me faisait crier. J’écris pour chercher le sens de ce qui m’est arrivé […] A la fois pouvoir nommer cela, le saisir en lui donnant une forme, et puis m’en dessaisir en le projetant hors de moi, hors de ma portée, hors de mes prises que je puisse donner ce qui m’a été donné. »

(Pierre Faure, « L’art de l’hymne », revue Gatéchèse, n0 167, 2/2002, p. 91-92)

(1) Sauf autre indication, toutes les citations de Didier Rimaud ci-dessous sont extraites de l’interview qu’il a donnée à la revue du CNPL Célébrer, n0 270, mai 1997, éditions du Cerf.

Bibliographie

Les arbres dans la mer, Desclée, 1975.
Des grillons et des anges, Desclée, 1979.
A force de colombe, Cerf, 1994.
La prairie de Genèse et autres contes, Editions Saint-Augustin, 1999.
Les Psaumes, « poèmes de Dieu, prières des hommes », Suppl. à Vie Chrétienne, n° 431.
Jour après jour, Psaumes au rythme des Exercices spirituels, Suppl. à Vie Chrétienne, n° 454.
Grâce à Dieu, Editions Saint-Augustin, 2002.

[Le catalogue du SECLI compte 204 textes de chants liturgiques écrits par D. Rirnaud.]

Partitions

L’enfant-musique, conte pour choeur d’enfants, récitant et petit ensemble instrumental. Texte Didier Rimaud, Musique Rager Calmel. Editions A Coeur Joie, 1984.
Le berger de lumières, conte musical pour choeur d’enfants, récitant et ensemble instrumental. Texte Didier Rimaud, Musique Rager Calmel. Editions A Coeur Joie, 1986.

Quelques disques

Avec Jo Akepsimas:
• Pour quelle fête – SM 30 484 B
• Pour éclairer tes pas – SM 30 777
• Lueurs de Pâques – SM 30 627

Avec Jacques Berthier:
• Que tes oeuvres sont belles – SM 30 13.05
• Au coeur de ce monde – SM 30 14.93
• Vienne la paix – SM 30 15.23
• Comme une aurore – SM 30 14.35
• Pour la gloire de Dieu – SM 12 17.40

Avec J. Berthier, J.-L. Cand, J. Gelineau, C. Villeneuve:
• Baptisés dans te Christ – SM 12 22.89

Avec Marcel Godard:
• Les Vêpres de l’immaculée – SM
• Les combats de Dieu
• Cantate « La Vierge à l’enfant » – SM

Avec François Vercken: –
• Les combats de Dieu – DPV CD 9467
• Lucernaire, Office du corps et du sang du Christ – Pavane Record, ADW 7331

Extraits d’un entretien du journal La Croix (2002) : Quelles conséquences a eu la redécouverte des psaumes ?

Dans les psaumes, Dieu se lève pour prendre la défense des petits et des pauvres. Les orientations de la Compagnie de Jésus, formulées par le P. Arrupe invitant à ne pas séparer l’annonce de la foi de la promotion de la justice, ont germé sur un terrain fécondé par les psaumes. C’est une option dont je me sens très partie prenante, même si je ne travaille pas moi-même dans les camps de réfugiés de Thaïlande ou du Rwanda. Elle m’occupe le coeur, elle m’obsède et c’est pour moi une grande joie d’entendre une communauté adopter des chants tels que  » Peuple d’un Dieu qui est justice, en prenant soin des plus petits, ta seule gloire est le service, l’amour de ceux que l’on oublie… « 

Vous semblez chanter plus volontiers la croix que la résurrection ?
Je suis continuellement interrogé par la passion du Christ dans l’humanité en souffrance, en gestation. Contempler les traces de résurrection, les espérances dans la misère, c’est plus difficile… Or la liturgie justement invite à célébrer la totalité du mystère du Christ, sa dimension cosmique. On parle beaucoup du Jésus de l’Evangile, mais le Christ vers lequel on va ? Ce Christ qui ne cesse de venir ? Nous ne sommes qu’au début de la redécouverte de ce mystère du Christ… Il manque encore souvent l’intelligence profonde de ce que l’Eglise propose : célébrer l’oeuvre de salut de Dieu passant par une oeuvre humaine. Pourquoi rend-on grâce à Dieu lors d’un mariage mais aussi de funérailles ? C’est chaque fois le mystère du Christ mort et ressuscité que l’on rappelle. Il s’agit de dire en même temps  » la gloire de Dieu et le salut du monde « . Le  » et  » est important : la liturgie n’est pas seulement pour la gloire de Dieu : la gloire de Dieu c’est le salut du monde. Ce qui est pour l’homme est pour Dieu.

Mais vous écrivez aussi des œuvres profanes… Quel rôle peut jouer la poésie dans l’annonce de la foi ?
L’annonce de la foi n’est pas réservée au public des sacristies ! D’ailleurs même quand on écrit pour la liturgie, on ne touche pas que des pratiquants : les chants de mariage, de funérailles doivent être missionnaires… Aussi, je préfère ne pas employer les mots de la sacristie qui risquent d’occulter le mystère plutôt que de l’éclairer. Lorsque j’écris des chansons, des contes, des opéras qui ne sont pas d’abord destinés à des croyants, j’aime partir de réalités de l’Évangile et de la foi, pour créer des liens entre ces univers, jeter des ponts. Car j’écris toujours ce qui se raconte en moi. Je pense au conte L’Enfant musique qui a été chanté dans une salle de cité universitaire où les enfants ne vont pas au catéchisme : il reprend la métaphore du Christ :  » Si vous ne devenez pas comme des enfants, jamais vous n’entrerez dans le royaume… de la musique ! « . Mais je ne m’autorise une annonce explicite que là où la demande est formulée.

Finalement est-ce le poète qui a été séduit par saint Ignace ou la Compagnie de Jésus qui a su révéler le poète ?
Très tôt je m’étais intéressé à la poésie, à la musique. Enfant, j’écrivais des poèmes, j’ai beaucoup chanté avec les scouts et pratiqué le violon. Je m’étais interrogé un temps sur la vocation de bénédictin ou de trappiste, mais c’est assez naturellement que je me suis orienté vers la Compagnie de Jésus où étaient déjà deux de mes oncles. De toutes façons je crois qu’en tout jésuite sommeille un moine. Certes, en entrant au noviciat à 19 ans, j’ai d’abord dû renoncer à la musique car les jésuites sont le premier ordre religieux à n’avoir pas d’office choral ! Mais cela ne signifie pas qu’ils ne s’y intéressent pas : un certain nombre de jésuites furent des liturgistes comme Jungmann, Gelineau avec qui j’ai beaucoup travaillé ou encore José Feder. Très vite, la musique m’a rattrappé. Le P. Bernard Geoffroy qui percevait comme indigents les textes de cantiques de l’époque – même si ce répertoire a soutenu la foi des chrétiens jusque dans les camps de concentration -, avait pris l’initiative d’un vaste chantier, la création d’un nouveau répertoire de chants liturgiques. Il m’a alors sollicité ainsi que Luc Estang, Patrice de la Tour du Pin, Jean-Claude Renard : autant de catholiques ouverts à la poésie. Tous nous ressentions alors une sorte d’urgence et avons travaillé au renouvellement du répertoire français dans les années 1950. Nous nous sommes donc réjouis de voir le Concile Vatican II commencer par la réforme de la liturgie. Mais il me semble que la réforme liturgique est encore loin d’avoir été reçue…

Propos recueillis par Laurence MONROE

Le P. Didier Rimaud sj et Juliette Gréco 

Dans la « La Croix » du 7 août 2008, dans la rubrique « Un été en chansons » (23/24), Robert Migliorini a décrypté ce texte de chanson populaire, une oeuvre du jésuite Didier Rimaud.

« L’abondante, et magistrale, discographie de Juliette Gréco, interprète aux choix assurés, comporte pour les années 68-69 une chanson d’un certain Didier Rimaud, « Faudrait » aller plus loin. François Rauber, ancien accompagnateur de Brel, orchestrateur, et qui avait signé avec Gréco un bail artistique, fructueux, devait trouver les couleurs musicales à cette ballade bien dans la tradition française. « Qui ne sait que l’amour est difficile ? Il appelle chacun au-delà de lui-même, toujours plus loin », précise le commentaire de la chanson. Rauber et Didier Rimaud (1922-2003) étaient devenus amis. Le jésuite Rimaud est connu pour ses compositions à usage liturgique.

Peu de gens ont eu l’occasion de le connaître comme auteur compositeur de chansons. Plusieurs textes ont été mis en musique dont « Quand nous décamperons » (par Rauber). Jo Akepsimas, dans le livret accompagnant la réédition de douze d’entre elles (disponible chez SM), en 2005, rappelle l’importance pour l’auteur de cantiques de ces chansons. « Nourri du répertoire des scouts de France, des chansons populaires, des négros spirituals, Rimaud a inventé un univers poétique original dans lequel il brode librement de merveilleuses variations mystiques autour de l’Évangile », souligne le compositeur qui a également collaboré avec celui qui avait participé à la traduction du Psautier. […] »

ROBERT MIGLIORINI

 Des photos du P. Didier Rimaud sj

Didier Rimaud dans un jardin

Un baptême célébré en juin 2003

Au piano son complice, le compositeur Marcel Godard

Avec des amis dans sa communauté