Michel THÉVENIAUT est né en 1934 à Orléans, où il fait ses études secondaires. Étudiant, il s’engage, activement, à la Jeunesse Étudiante Chrétienne (JEC) et se prépare à une licence d’histoire à La Sorbonne, puis entre au noviciat de Laval en novembre 1955. En 1961, il enseigne l’histoire à Paris, au lycée Saint-Louis de Gonzague. Par la suite, il aimera évoquer, non sans humour, cette période un peu paradoxale, pour lui qui se voulait proche des pauvres et loin des institutions. Dès sa formation en théologie à Lyon-Fourvière, de 1964 à 1968, il s’intéresse, aux « enfants qui n’ont personne », au sein de l’association AJD (Amis de Jeudi-Dimanche) que Maurice GOUNON sj animait depuis 1964.

Ordonné prêtre en juillet 1967, il devient, bien vite et pour de nombreuses années, un étroit collaborateur de Maurice. Il est, en particulier, un fidèle rédacteur de son bulletin périodique « Histoires vraies ». Son art de bien écrire lui permet de mettre en forme les nombreux témoignages personnels que lui livre Maurice sur la misère des jeunes abandonnés de tous. L’un et l’autre ont compris que ceux qu’on appelle « délinquants » sont, souvent, des jeunes en quête d’une présence adulte amie qui les mette en confiance et leur permette de se structurer pour réaliser un projet. Dès 1968, tout jeune prêtre, Michel devient, ainsi, adjoint au responsable du Foyer AJD de la rue des Antonins, à deux pas de la cathédrale Saint-Jean ; il partage avec les deux autres membres de l’équipe cette pédagogie de proximité qui réclame un engagement permanent et une mobilisation jours et nuits, sans vacance ni week-end, auprès d’une trentaine de jeunes. Au milieu des tempêtes, Michel reste calme, modestement sûr de lui, ironique, mais bienveillant et, toujours, d’un optimisme à toute épreuve.

Quelques années plus tard, nous le retrouvons à Villeurbanne partageant avec une autre équipe les repas et la vie quotidienne des jeunes confiés. Un chien s’est, aussi, introduit dans son existence. Il partage, sans doute, la même vigilance puisqu’il a, dit-on, le don d’aboyer quand le taux d’alcoolémie de ceux qui rentrent tard est trop élevé ! Pendant toutes ces années, Michel s’est dépensé en liens de toutes sortes avec sa famille, sa communauté jésuite, ses amis, dont il ne manque jamais de fêter, discrètement, l’anniversaire par un petit coup de fil.

Après son emménagement à Vaulx-en-Velin, dans le milieu des années 80, au quinzième étage d’une grande tour, son engagement auprès des quatre MAJO le mène à resserrer les liens entre les établissements. Il participe, également, aux célèbres brocantes des AJD. Toujours, avec humour et sans bruit, il multiplie les démarches de défense auprès du tribunal des mineurs ; il reçoit, héberge chez lui, accompagne et aide, financièrement et moralement, des jeunes et moins jeunes en difficulté. Il va jusqu’à dormir dans sa voiture pour laisser son logement à une famille. Dans les dernières années, il participe à l’aumônerie d’une EPHAD et préside des messes hebdomadaires dans une maison de retraite et à la paroisse de Vaulx-en-Velin.

Ces nombreuses activités n’ont pas empêché Michel de rester un intellectuel pétri d’histoire ainsi que de culture littéraire et musicale, refusant toute idolâtrie, méfiant vis-à-vis de toute institution, y compris les institutions cléricales, sensible envers les personnes fragiles et les situations extrêmes. Lors de sa disparition, en novembre 2020, l’un de ses amis déclarait : « Michel était un théologien de l’existence, il ne théorisait pas, restait silencieux sur ce qui devait le rester ; il s’intéressait uniquement à ce que le réel lui donnait, vraiment et pleinement. Michel était un vivant, ni dans la nostalgie de l’avant ni dans la peur de l’après. Il était présent au présent. »

Host-Henri du ROURE sj et Jean-Noël GINDRE sj