Basque, Hubert BARATCHART est né en 1928, à Lunéville, dans une famille d’officiers. En 1940, grièvement blessé, son père est décédé faute de soins et enterré dans la fosse commune ; en 1944, un de ses trois frères aînés meurt au combat.

En 1945, après le lycée à Lunéville, Hubert entreprend deux années d’études de philosophie au Grand Séminaire d’Issy-les-Moulineaux. Puis, il entre au noviciat de La Croix-sur-Ourcq en 1947. Après le juvénat à Yzeure et la philosophie à Vals, il fait deux années de régence au Collège Saint-Joseph de Reims. Suivent deux ans de théologie à Enghien, puis deux autres à Chantilly et le Troisième An à Saint-Martin-d’Ablois.

Commencent alors vingt-cinq années au service de l’éducation : « En 1963, je suis envoyé dans un collège alors que je ne connais rien à la manière de faire des jésuites ». Il gardera un grand souvenir des dix-huit ans passés au Collège de Reims : « les Pères qui y renouvellent les habitudes éducatives de l’époque m’accueillent comme l’un des leurs : grande grâce, source d’une profonde joie ». Préfet des études du premier cycle, coordinateur de la catéchèse et directeur de la chorale, il met en œuvre la nouvelle pédagogie : « rendre les êtres libres et responsables, mais aussi les éveiller intérieurement au goût de l’œuvre bien faite et au discernement dans la foi ». Le « tsunami post-mai 1968 menace le mouvement engagé », mais « nous nous sommes épaulés les uns les autres » pour tenir bon.

En 1988, c’est le grand dépaysement : onze ans curé à Saint-André de la Réunion, une paroisse très vivante, riche de plusieurs lieux de culte au milieu des champs de canne à sucre. Un nombre important de fidèles sont des Malbars, d’origine indienne. Hubert célèbre plusieurs messes par jour ; il est très attentif aux jeunes. Partout, il s’émerveille de « l’accueil reçu, la simplicité, la générosité et la confiance manifestée ». En 1997, il cède volontiers la place à un jeune prêtre réunionnais et devient pour dix ans supérieur de la résidence jésuite du Sacré-Cœur et chapelain de l’église, jusqu’à son retour en métropole en 2007.

Après six années de pastorale à Paray-le-Monial et à Nancy, il arrive à Vanves alors qu’il a déjà 86 ans pour « y mener régulièrement ma vie religieuse ». Il anime les chants de sa belle voix, mais ne communique guère. C’est alors que son frère et une nièce l’ont particulièrement entouré, au nom de la nombreuse famille pour laquelle Hubert s’est beaucoup dépensé, depuis les veuves de guerre jusqu’à ses 150 neveux et petits neveux qui l’appellent en basque Otto Apheza (« oncle prêtre »). Bien sûr, « il ne répondait pas toujours à nos appels, ne voulait pas se plaindre, essayait de se relancer, en gardant son humour, avec une volonté chancelante, qui finissait par atteindre son moral ». Il parlait souvent du sacrifice de la messe, « source, force et joie profonde de sa vocation ». La conclusion est pour sa nièce : « le lundi avant sa mort, j’ai écouté avec lui Cantico dell’Agnello de Marco Frisina et je lui ai dit : « Otto Apheza, cette voix, c’est la vôtre ». Il a souri, il était déjà dans la Paix. »

Michel MASSON sj