Méditation pascale pour temps de confinement, proposée par le P. Vincent Klein sj.

Tableau 1 : Le jardin de la jouissance

Tu es un jardin verrouillé
Ma sœur, ô fiancée,
Une source verrouillée,
Une fontaine scellée. (Ct 4, 12)

Clos dans le jardin où tu m’as placé
J’entends le gravier crisser sous tes pas
Tu me vois bêcher, irriguer et veiller
Ton haleine donne vie à la glaise inerteLe potager se tache de vertes promesses
Les mésanges s’ébrouent dans la fontaine,
Aspergent aux quatre vents et s’envolent en riant
Les fruitiers se gonflent de couleurs sonoresTulipes, violettes et jonquilles secouent la tête
Tous ces visages que tu posas devant moi
Bouquets de rencontres furtives ou fidèles
L’éphémère beauté jette une ancre éternelle

 

Tableau 2 : Le jardin à l’ouest


Il faut que je me lève
Et que je fasse le tour de la ville ;
Dans les rues et les places,
Que je cherche celui que mon cœur aime. (Ct 3, 2)

Un geai se pose sur l’enceinte au levant
Il regarde par-delà et cajole bruyamment.
Distrait, ravi, excité, j’enjambe la muraille
J’erre dans le tumulte et perds connaissanceÉpuisé, lacéré, mes yeux s’ouvrent
Sur une trouée et le jardin foulé.
Règnent le silence assourdissant des oiseaux
Et le gravier qui crisse sous ton pasJ’ai peur du fouet des paroles blessantes
J’étouffe dans ce corps nu, meurtri et malade.
La tulipe détourne la tête à mon passage
Et le merle sautillant se cache sous les iris

 

Tableau 3 : Le jardin au pressoir

Mon chéri descend à son jardin
Aux parterres embaumées,
Pour paître au jardin
Et pour cueillir les lis (Ct 6, 2)

La nuit est noire et la ténèbre lourde
Le jardin tapisse un lit d’herbe fraîche
Autour d’oliviers aux corps calcinés
Par le sel de la sueur et les larmes de sangPlus de fruits accrochés à leurs doigts noueux
Déjà la récolte au pressoir est broyée
Son huile avec soin recueillie oindra
D’un geste féminin un visage torturéLe jardin atteste la veille indigente
Quand dans la vallée un chien hurle à mort
Cris et silences sculptent profond les troncs
Tabernacles de mémoire, hôte des ans

 

Tableau 4 : Le jardin au rocher creusé

Au jardin des noyers je descends
Pour admirer les pousses de la gorge,
Pour voir si le cep bourgeonne,
Si les grenadiers fleurissent (Ct 6, 11).

Au jardin pentu couvert de rosée
Les larmes espèrent la promesse matinale.
Voici qu’elle rosit le rocher béant
Où la meule roulée seule monte la gardeLe visage d’une femme aux yeux rougis
Incline sa foi vers l’abîme et perçoit :
Deux draps blancs qu’un vent love sur un fil
Lui caressent les cheveux souriantsElle reconnaît le jardinier à son pas
Se retourne au chant de son nom et voit
Une colombe et les amandiers en fleur.
Joie pascale, rencontre insaisissable.

P. Vincent Klein sj
Photos prises dans le jardin de la communauté
128, rue Blomet, Paris 15

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