Ce 31 mars 2023, les évêques de France réunis en Assemblée plénière à Lourdes ont voté l’ouverture de la cause en vue d’une éventuelle béatification du cardinal Henri de Lubac sj. Théologien du Concile Vatican II, attaché aux sources de la foi chrétienne, il est une figure majeure de la théologie au XXe siècle.
Le ministère du père Henri de Lubac a été consacré au travail intellectuel. Acteur du renouveau de l’Église au XXe siècle, il a vécu crises et débats théologiques que celle-ci a traversés : la crise moderniste au début du siècle jusqu’au Concile Vatican II (1962-1965). Le père de Lubac a aidé l’Église à accueillir le souffle de l’Esprit sans se dérober aux difficultés qui se présentaient à lui.
Henri de Lubac, jésuite et théologien
Henri de Lubac est l’un des plus grands théologiens du XXe siècle. Soupçonné de moderniste à partir de 1946 avec la publication de son ouvrage « Surnatuel », réduit au silence, il devient l’un des grands acteurs du concile Vatican II. Placé très jeunes au contact des jésuites, il parfait son éducation à leurs côtés et entre au noviciat dans la Compagnie à la veille de la Première Guerre mondiale. Henri de Lubac va passer 78 ans dans la Compagnie, jusqu’à sa mort.
Une figure majeure que l’émission La Foi prise au Mot a voulu découvrir
Entré au noviciat dans la Compagnie de Jésus en 1913, Henri de Lubac est ordonné prêtre en 1919, et termine sa formation de jésuite en 1929. Il devient alors professeur de théologie fondamentale aux Facultés catholiques de Lyon.
Henri de Lubac n’a eu de cesse de rejoindre l’Église de son temps. Il participe dans les années 1940 à la création de la collection Sources chrétiennes dont il est le codirecteur avec le père Daniélou. Il est habité par cette problématique du lien entre « enjeux de l’histoire » et foi. Sources chrétiennes est une édition des textes de l’Antiquité chrétienne, des Pères de l’Église. Cet attachement de Henri de Lubac aux sources de la foi, à la Tradition, a été mal compris par certains de ses contemporains qui y ont vu un archaïsme désuet. Pour lui, la connaissance de la naissance du Mystère chrétien était au contraire la garantie de son progrès à travers sa correcte expression au cours des siècles.
Surnaturel : la pensée de Henri de Lubac
En 1946, la publication de son ouvrage Surnaturel le conduit à être soupçonné de modernisme. C’est le début d’une période longue et difficile pour le père de Lubac. En 1950, il est évincé de la faculté de Lyon dans laquelle il enseigne. De 1950 à 1960, il ne peut plus enseigner. Mais plus que l’incapacité d’enseigner, c’est l’absence de dialogue autour de cette décision qui sera le plus douloureux à vivre pour lui. Il écrit dans Mémoire sur l’occasion de mes écrits : « dans toute l’affaire […], qui dura tant d’années, je ne fus jamais interrogé, je n’eus jamais un seul entretien sur le fond des choses avec aucune autorité romaine de l’Église ou de la Compagnie ». Néanmoins, le père Henri de Lubac poursuit ses activités intellectuelles au cours de cette période et publie notamment en 1953 son ouvrage Méditation sur l’Église.
Pour découvrir la pensée du père Henri de Lubac
Le terme « Surnaturel » qui est le titre de l’ouvrage d’Henri de Lubac peut surprendre. Il ne s’agit pas ici de manifestations surnaturelles ou étrange. À l’occasion de la publication aux éditions du Cerf de Surnaturel. Études historiques, l’émission La Foi prise au Mot s’intéresse aux relations entre ces mots qui ont fait couler beaucoup d’encre : surnaturel, nature et grâce. Avec Simon Icard, historien de la théologie, et le père Thierry-Dominique Humbrecht, dominicain, spécialiste de saint Thomas d'Aquin.
Henri de Lubac et le concile Vatican II
La période difficile qu’il traverse prend fin en 1960. Le pape Jean XXIII le nomme consulteur à la commission théologique préparatoire au concile Vatican II. Henri de Lubac devient expert au Concile. Il œuvre dans l’ombre, et sa participation n’est pas négligeable. Il permet au Concile les réflexions et les grandes orientations pour que l’Église puisse entrer en dialogue avec le monde contemporain.
À la fin du Concile en 1965 et jusqu’en 1991, Henri de Lubac va être acteur de la réception du Concile. Conscient de la période difficile qui s’ouvre, des interprétations erronées qui peuvent naître de la lecture des textes conciliaires, Henri de Lubac écrit, parle et défend le Concile Vatican II. Accusé quelques années plus tôt de modernisme, il est taxé cette fois de raideur.
Le 2 février 1983, le pape Jean-Paul II le crée cardinal. Une reconnaissance pour le père de Lubac à la fin de sa vie.
La fécondité des intuitions d'Henri de Lubac
Quelques dates
20 février 1896 : naissance à Cambrai 1902 : arrivée de sa famille à Lyon 1909 : devient élève au collège jésuite de Mongré (Villefranche-sur-Saône) 9 octobre 1913 : entrée au noviciat (Jésuites) 5 avril 1915 : membre d’un régiment d’infanterie 1917 : blessure à la tête à la guerre 25 septembre 1919 : démobilisation et reprise de la formation ignatienne 22 août 1928 : ordination sacerdotale 1928-1929 : « Troisième an » à Paray-le-Monial, dernière année de formation chez les Jésuites 1929 : donne ses premiers cours de théologie fondamentale (Facultés catholiques de Lyon) 1942 : publication du premier volume inaugural des « Sources chrétiennes », dont il est codirecteur avec le père Daniélou 1946 : publication de son ouvrage « Surnaturel » qui fait scandale. Il est suspecté de modernisme 1950-1960 : éviction de la faculté, interdit d’enseignement, capacité de publication limitée 1960 : nommé consulteur à la commission théologique préparatoire du concile Vatican II par le pape Jean XXIII 1962-1965 : Concile Vatican II, participation de Lubac au chantier conciliaire 1965-1991 : Il s’engage dans une juste réception du concile Vatican II 2 février 1983 : création comme cardinal par le pape Jean-Paul II 4 septembre 1991 : décès à Paris 31 mars 2023 : Vote de l'ouverture de la cause en vue d'une éventuelle béatification par les évêques de France réunis en Assemblée plénière à Lourdes
