Xavier Nicolas

Ces dernières années, presque aveugle et malentendant, Xavier NICOLAS n’a cessé d’évoquer avec une immense gratitude ses nombreux ami(e)s. C’était sa prière quotidienne. Il n’avait plus de famille ; il avait ces amis dont certains venaient joyeusement déjeuner avec lui qui les avait soutenus un jour de leur vie.

Il est né le 18 janvier 1921 à Vergaville où ses parents tenaient l’épicerie de ce petit village de la Moselle. Il est fils unique, issu d’un milieu populaire. Après une licence de Lettres Classiques à Nancy pendant laquelle il découvre les jésuites du GEC, il rejoint la Compagnie au Vignau en décembre 1942. Suivirent les étapes du juvénat à Yzeure, de la philo à Vals-près-le Puy, et de la théologie à Enghien. Ordonné le 27 juillet 1952, il fait le Troisième An à Saint- Martin-d’Ablois.

Après trois années à la Maison des Exercice spirituels de Colmar et trois autres à Nancy, il rejoint en 1962 l’équipe des « Missions de l’intérieur » alors basée à Chantilly. À partir de l’année 1967-68, il est aumônier de l’enseignement technique à Rouen. Au cours de cette année, il fait la découverte de « Vie Nouvelle ». Son esprit indépendant se retrouve dans ces équipes qui réfléchissent à leur rôle civique et politique et repensent leur mission de laïcs chrétiens.

Après une année d’études à l’Institut Supérieur de Pastorale Catéchétique de Paris, Xavier entre en eaux profondes. Ce sont d’abord les quinze années au Havre (1970-1985), pendant lesquelles il se fait recruter comme « travailleur social » alors qu’il n’a pas le diplôme requis ! Par équipes de deux, il accompagne les familles qui ont des enfants en difficulté. Il loge dans un HLM et met tout son cœur dans ce contact quotidien avec un milieu populaire souvent éloigné de l’Église.

Puis, en 1985, il est nommé Directeur du « Service Incroyance-Foi ». Le voilà l’homme d’une institution ! Il s’y met avec fougue et, parfois, avec des déclarations abruptes qui peuvent étonner dans les diocèses où il doit ranimer le message de Vatican II sur la « Liberté religieuse ». De ses conférences et de ses billets mensuels dans le journal La Croix sortira le livre Les incroyants ont bouleversé ma foi. Une conviction qu’il ne cessera de partager à partir de 1997 à Mulhouse, Évreux, Reims, Rouen, tout en étant aumônier de prison ou des Gitans ; il s’inscrit même au Secours Populaire. Il est clair que Xavier a toujours aimé ce monde que Dieu aime et qu’il a toujours tenté d’exporter sa religion – ce fut une de ses expressions – sans imposer pour autant sa culture.

« Tu nous parlais, souvent, de pauvreté de l’âme, de fraternité, d’amitié, de liberté et de justice, toujours en les reliant au Très Haut », écriront un groupe d’amis. « Merci, Seigneur, d’avoir mis Xavier sur nos routes ».

Michel MASSON sj