éducation école Le P. Xavier Nucci, jésuite, qui a lancé une pédagogie visant à favoriser l’éveil de la vie intérieure des enfants, donne son point de vue sur la méditation de pleine conscience (1).

La Croix  : Que pensez-vous de cet engouement pour la méditation de pleine conscience ?

P. Xavier Nucci  : Je ne peux que me réjouir de constater que de plus en plus de personnes ont le désir de prendre du temps pour se poser. Nous sommes conscients que nos vies sont marquées par un rythme élevé. Il est bon de se donner les moyens de s’arrêter pour souffler. Pour autant, il me semblerait dommage que cette aspiration se satisfasse de quelques exercices de relaxation. L’enjeu est trop important pour se réduire à cela. J’ai d’ailleurs été frappé, lors d’une journée sur ce thème (organisée par le magazine La Vie) dans laquelle j’intervenais, que des conférenciers comme Christophe André, Matthieu Ricard ou Fabrice Midal aient tous insisté sur ce point.

Ce terme de « méditation » ne recouvre-t-il pas des réalités contrastées selon les traditions dont il est issu ?

P. X. N.  : Oui, c’est très juste. Ce mot de « méditation » peut être compris de manières très différentes selon que l’on parle de méditation zen, chrétienne, du yoga ou de l’islam. De plus, des sectes se sont engouffrées dans ce « créneau » à la mode. Ce qui permet de faire la différence entre toutes ces formes, c’est de comprendre la vision de l’homme qui est derrière (elle n’est pas la même dans le bouddhisme que dans le christianisme, par exemple) mais aussi le rapport à la dimension spirituelle. Je sais bien que des auteurs parlent de « spiritualité athée », mais là encore ce terme recouvre des réalités bien différentes. Pour nous chrétiens, la spiritualité est un chemin vers Dieu où nous sommes guidés par son Esprit d’amour.

Et pour les enfants, est-ce un bon moyen pour les aider à croître ?

P. X. N. : Les jeunes, très tôt, sont de plus en plus sollicités par des activités extérieures. Tout ce qui peut permettre de leur faire prendre conscience de ce qui se vit en eux est précieux. Il y a dix ans, quand nous avons lancé nos propositions d’éveil à la vie intérieure, nous passions pour des originaux. Aujourd’hui, cela ne fait plus question. Cependant, ces temps de pause ne peuvent se résumer à la proposition de quelques techniques, si bienfaisantes soient-elles.

Trois conditions me semblent indispensables pour éviter cela : que les adultes qui guident ces propositions les aient vécues déjà pour eux-mêmes ; qu’ils le fassent avec beaucoup de respect et d’écoute de ce qui se passe dans l’enfant quand il pratique ces exercices et, pour cela, qu’ils favorisent l’expression d’une parole après chaque expérience ; que, enfin, ces exercices soient vécus si possible avec d’autres, pour permettre à l’enfant de ne pas être replié sur lui-même. Car la finalité de tout cela, c’est bien de l’aider à vivre davantage en relation avec lui-même mais aussi avec les autres et, par là même, avec Dieu, source de tout Amour et de toute Paix.

(1) Cette proposition, lancée par une équipe de chefs d’établissements du primaire, est aujourd’hui vécue dans de nombreux établissements en France.

Pour en savoir plus :

L’éducation à l’intériorité dans les classes primaires (article sur Ignace de Loyola Education) est en lien étroit avec les objectifs de la pédagogie ignatienne. Développée dans l’ensemble des établissements scolaires jésuites, cette pédagogie porte de beaux fruits. Exemple au Caousou, à Toulouse, où l’éveil à l’intériorité a été mis en place depuis plusieurs années.

> Photos : Ignace de Loyola Education / Source : Journal La Croix